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Mesures de produits phytosanitaires dans l’air en zone arboricole et en milieu urbain, campagne de mesure printemps-été 2007

  • Air extérieur

Depuis 2002, Air Pays de la Loire mène un programme d'étude de la pollution atmosphérique par les produits phytosanitaires. Après le maraîchage et la viticulture, Air Pays de la Loire s’est intéressé à une autre activité agricole spécifique de la région : l'arboriculture fruitière.
Une campagne de mesure a été menée en 2007 dans le Maine-et-Loire, où sont localisés les deux tiers des vergers de la région. Un site proche des lieux d'application des phytosanitaires (Écouflant) et une zone habitée plus éloignée (Angers) ont été surveillés pendant trois mois et demi.
Parmi les 50 molécules phytosanitaires recherchées dans l’air des vergers d’Écouflant, deux molécules utilisées en arboriculture se sont révélées prédominantes : le captane (fongicide) et le chlorpyriphos éthyl (insecticide). Sur le site de mesure d’Angers, l’étude a montré un impact faible des traitements arboricoles et viticoles sur la qualité de l’air urbain. À ces niveaux, le produit phytosanitaire détecté majoritairement en ville, l’oxadiazon, était un herbicide utilisé pour le désherbage des parcs, jardins publics, trottoirs.

contexte : premières mesures en zones arboricoles

Les produits phytosanitaires regroupent l’ensemble d’un grand nombre de produits chimiques utilisés pour la protection des cultures.

Ces produits peuvent se retrouver dans l’air ambiant soit par des phénomènes de dérive lors du traitement, de post volatilisation après traitement ou par l’érosion éolienne de particules.

Dans le cadre de l’orientation 2 du Plan Régional de la Qualité de l’Air, Air Pays de la Loire a initié en 2002 un programme de mesure des pesticides dans l’air. Cette première étude portait sur la mesure de produits phytosanitaires en zones viticoles (pays de Muscadet) et maraîchères, et a permis de valider la procédure métrologique. Après cette première campagne expérimentale, Air Pays de la Loire a poursuivi en 2004 et 2006 les mesures en zones viticoles (Muscadet puis Anjou).

En 2007, dans le cadre du Plan Régional Santé Environnement, un cofinancement entre Air Pays de la Loire et la Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales des Pays de la Loire a permis d’étudier un autre type d’activité agricole très représentée dans la région : l’arboriculture.

L’extension de la surveillance à des polluants atmosphériques moins pris en compte jusqu’à présent tels que les pesticides est une priorité affichée par le Ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables ; rappelée par Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat à l’Ecologie par communiqué de presse du 5 juillet 2007.

objectifs : 3 objectifs principaux

L’objectif de cette étude est triple :

  • évaluer les niveaux de produits phytosanitaires dans l’air durant les périodes propices aux traitements en zone arboricole à proximité de vergers ;
  • évaluer en même temps les niveaux en pesticides en milieu urbain dans une agglomération proche des zones de vergers ;
  • analyser l’évolution temporelle des concentrations atmosphériques en lien avec les périodes de traitement.

moyens : 3.5 mois de mesures simultanées sur 2 sites

Pour répondre aux objectifs fixés, le dispositif suivant a été mis en œuvre :

2 sites de mesure

Deux sites de mesure ont été dotés de collecteurs (partisol 1 m3/h) prélevant les phases particulaire et gazeuse des produits phytosanitaires dans l’air :
l’un en zone arboricole à Écouflant au lieu dit la Plesse à une vingtaine de mètres des vergers les plus proches et le second dans le quartier Monplaisir à Angers (milieu urbain à forte présence de population).

Ces 2 sites sont distants de 4 kilomètres. Leur localisation a été déterminée à partir de l’étude de la répartition des vergers en Maine et Loire, situés essentiellement au nord de l’agglomération angevine.

Localisation des sites de mesures
Localisation des sites de mesures

50 molécules mesurées en continu durant 3.5 mois

Des prélèvements hebdomadaires simultanément sur les 2 sites ont été effectués du 16 mai au 5 septembre 2007. Cette période englobe les principaux traitements insecticides et fongicides réalisés sur les vergers.

50 molécules ont été analysées dans chaque prélèvement. La sélection de ces molécules a été établie par le croisement de 3 bases de données. Deux listes de molécules ont été fournies respectivement par le Service Régional de la Protection des Végétaux et par la société PomAnjou (principal producteur de pommes sur la commune d’Écouflant). La troisième base de données a été établie à partir de l’étude bibliographique des produits recherchés et détectés dans l’air en zones arboricoles des régions Midi-Pyrénées et Centre.

résultats 1 : zones arboricoles (la Plesse - Écouflant)

le captane : la molécule la plus abondamment mesurée

L’analyse de la contribution relative de chaque molécule à la concentration atmosphérique totale en pesticides montre que le captane représente près de la moitié de la masse des pesticides mesurés. Le captane et le chlorpyriphos éthyl représentent 83 % de la concentration totale de produits phytosanitaires. Le captane est utilisé en zones arboricoles comme fongicide notamment contre la tavelure de début mars à la période de cueillette (août-octobre). Le chlorpyriphos éthyl est un insecticide utilisé pour la lutte contre le carpocapse (« ver du fruit »).

Des molécules peu ou pas utilisées en arboriculture sont également détectées mais restent très minoritaires. Citons pour exemple le folpel utilisé comme fongicide anti mildiou en viticulture, la trifluraline et l’alachlore (herbicides de grandes cultures).

Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides mesurée à la Plesse (Écouflant) du 16 mai au 5 septembre 2007
Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides mesurée à la Plesse (Écouflant) du 16 mai au 5 septembre 2007

une évolution temporelle cohérente avec les périodes de traitement

Les périodes de traitements nous ont été fournies par le Service Régional de la Protection des Végétaux et la société Pomanjou. L’étude comparative des périodes de traitements et des variations temporelles des concentrations atmosphériques montre une bonne cohérence entre les niveaux enregistrés dans l’air et les périodes d’utilisation des principaux fongicides et insecticides.

évolution temporelle des concentrations atmosphériques en chlorpyriphos éthyl à la Plesse (Écouflant) et dans le quartier Monplaisir à Angers du 16 mai au 5 septembre 2007
Évolution temporelle des concentrations atmosphériques en chlorpyriphos éthyl à la Plesse (Écouflant) et dans le quartier Monplaisir à Angers du 16 mai au 5 septembre 2007

comparaison arboriculture – viticulture : des molécules très spécifiques et des produits communs

L’étude comparative de la contribution des différentes molécules à la concentration totale en pesticides montre la présence de molécules très spécifiques (le captane en zone arboricole et le folpel en viticulture). Des molécules ont aussi été détectées sur les 2 types d’activité agricole. C’est le cas notamment du chlorpyriphos éthyl utilisé comme insecticide à la fois en arboriculture et viticulture.

Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides en zone arboricole (la Plesse - Ecouflant) du 16 mai au 5 septembre 2007 et Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides en zone viticole (Moulin turquay - Martigné Briand) du 8 juin au 31 août 2006
Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides en zone arboricole (la Plesse - Ecouflant) du 16 mai au 5 septembre 2007 (à gauche)
Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides en zone viticole (Moulin turquay - Martigné Briand) du 8 juin au 31 août 2006 (à droite)

résultats 2 : en zones urbaines (quartier Monplaisir - Angers)

une signature différente des zones arboricoles

Au niveau du quartier Monplaisir à Angers, nous enregistrons une contribution forte (30 %) de l’oxadiazon. Cet herbicide présente un large spectre d’utilisation. Il est notamment employé pour le désherbage des allées de parcs, de jardins publics, des trottoirs en milieu urbain. La présence de cette molécule en zone urbaine a été mise évidence par le réseau de surveillance de la Région centre sur des sites urbains à Tours et Blois en 2004 et Chartes en 2005 [4, 5] A la différence du site d’Écouflant où 2 molécules représentent plus de 80 % de la totalité des produits phytosanitaires, nous observons des contributions plus homogènes des différentes molécules détectées sur le site d’Angers.

Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides au niveau du quartier Monplaisir
Contribution de chaque molécule à la concentration totale en pesticides au niveau du quartier Monplaisir

un impact faible mais visible de certains traitements arboricoles et viticoles

La présence de folpel et de chlorpyriphos éthyl dans le quartier Monplaisir à Angers, indique un impact faible mais visible des traitements arboricoles et viticoles sur les teneurs atmosphériques enregistrés au niveau du quartier Monplaisir. Cet impact demeure faible. En effet, les teneurs en chlorpyriphos éthyl demeurent inférieures respectivement d’un facteur 20 à celles mesurées à proximité des vergers et le niveau moyen de folpel à Angers demeure 18 fois plus faible que celui enregistré en 2006 à proximité des vignes à Martigné Briand.

conclusions et perspectives : vers une surveillance pérenne des pesticides dans l’air

Suite aux études menées en zones viticoles (Muscadet 2002, Muscadet 2004, Anjou 2006) et arboricole (cette étude), le prolongement de ces études réalisées pendant les périodes de traitement par un suivi périodique et pérenne des niveaux de pesticides dans l’air dans les Pays de la Loire est à construire. Cette surveillance pourrait se baser sur 3 objectifs principaux :

  • focaliser la surveillance dans les zones habitées susceptibles d’être impactées par les différentes activités agricoles : bourgs viticoles, agglomérations proches des zones de traitement ;
  •  appréhender les différentes activités agricoles de la région (viticulture, arboriculture, maraîchage) ;
  •  se focaliser sur les périodes de traitement avec également une surveillance hors de ces périodes pour connaître la persistance des molécules dans l’air selon une stratégie d’échantillonnage à définir. Les travaux statistiques en cours par un groupe pilote associant différentes structures de surveillance de la qualité de l’air devraient permettre de bâtir cette stratégie.